Le 25 septembre 1915, la bataille de Loos se déclare en plein cœur de l’Artois, marquant une étape importante du front de l’Ouest pendant la Première Guerre mondiale. En cette année 1915, les lignes de front stagnent, chaque armée restant terrée dans ses tranchées. Arras, située non loin de cette zone de combats intenses, est au cœur des préoccupations stratégiques. C’est là que l’état-major britannique, en coordination avec l’armée française, espère percer les lignes allemandes en Artois pour faire reculer les troupes ennemies vers la Belgique. Pourtant, malgré des plans d’attaque ambitieux, les Alliés se retrouvent rapidement confrontés aux conditions et aux obstacles impitoyables du champ de bataille. Revenons sur les enjeux de la bataille de Loos et son échec, qui a aussi marqué l’histoire d’Arras et de ses alentours.
L’ambition des Alliés : Percer les lignes ennemies en Artois
Depuis le début de la Première Guerre mondiale, la région d’Arras et de l’Artois est régulièrement le théâtre de batailles importantes. L’état-major français et britannique, voyant les tranchées immobiliser le front, décide de coordonner une grande offensive en septembre 1915. Cette « Grande Attaque » doit se dérouler sur deux fronts : l’armée française attaque en Champagne, tandis que les troupes britanniques, soutenues par des contingents français, mènent une offensive en Artois. Arras devient alors un point de rassemblement stratégique, où les Alliés espèrent créer une brèche pour désorganiser les lignes allemandes et permettre une avancée significative vers le nord.
Pour assurer le succès de l’attaque, les Britanniques mettent en place un bombardement intense dès le 20 septembre sur les lignes allemandes, tentant de détruire les barbelés et de déstabiliser les positions adverses. Cette stratégie, censée préparer le terrain pour une avancée rapide, se révèle pourtant peu efficace, les fortifications allemandes demeurant largement intactes. À cette occasion, les Alliés déploient pour la première fois du gaz au chlore, espérant en faire une arme décisive pour affaiblir les défenses allemandes. Malheureusement, le vent contraire renvoie le gaz vers les soldats britanniques, piégeant ainsi de nombreux soldats alliés et révélant l’imprévisibilité des nouvelles armes chimiques sur le champ de bataille.
Arras, en tant que ville située à proximité immédiate des combats, subit aussi des répercussions directes de cette offensive : Les ressources locales sont réquisitionnées, et les civils, soumis aux mouvements de troupes, voient leur quotidien transformé par l’effort de guerre. En dépit des préparatifs intensifs et de l’utilisation d’armes chimiques, la zone de Loos et l’Artois demeurent des obstacles infranchissables pour les Alliés, exposant leurs faiblesses stratégiques et logistiques.
Des avancées ponctuelles mais un bilan humain tragique
Le 25 septembre, l’assaut est enfin donné. Sept divisions britanniques, épaulées par la Nouvelle Armée Kitchener composée de nouvelles recrues, se lancent dans la bataille. Les soldats doivent progresser sur un front de 12 kilomètres, au cœur de l’Artois, dans un terrain boueux et détrempé par des pluies intenses. Au sud, malgré des conditions défavorables, l’attaque parvient à des succès notables : les Britanniques capturent le village de Loos ainsi que la fameuse « Colline 70 », un point stratégique offrant une vue imprenable sur la région environnante, y compris vers Arras.
Cependant, cette avancée prometteuse est rapidement stoppée en raison d’une logistique défaillante : les munitions viennent à manquer, et les renforts tardent à arriver. Cette situation permet aux Allemands de contre-attaquer efficacement, reprenant la « Colline 70 » et arrêtant net l’avancée britannique. Plus au nord, les troupes britanniques font face à la redoutable « Redoute Hohenzollern », un complexe de tranchées et d’abris allemands lourdement fortifiés. Les Britanniques, exposés aux mitrailleuses allemandes, subissent des pertes massives : environ 8 500 soldats britanniques sont tués en une seule journée, marquant l’une des journées les plus meurtrières pour le Royaume-Uni depuis le début du conflit.
Le lendemain, le 26 septembre, les renforts allemands arrivent en nombre pour défendre leurs positions. Faute de soutien suffisant, les Britanniques lancent des attaques sans bombardement d’appui, une décision qui conduit à des pertes humaines terribles. Incapables de maintenir leurs positions, ils se retirent progressivement, abandonnant certaines des avancées réalisées la veille. Malgré plusieurs jours de combats acharnés, la bataille de Loos prend fin sans avoir atteint ses objectifs, laissant l’Artois et la région d’Arras dans une situation fragile, au cœur d’un front désormais consolidé par les Allemands.
Situation de Loos-en-Gohelle, lieu de la bataille à proximité de Lens :
Par la suite : L’impact de la bataille de Loos sur la région d’Arras
L’échec de la bataille de Loos a des répercussions majeures pour les Alliés et pour la région d’Arras, qui continue d’être exposée aux combats et aux bombardements tout au long du conflit. Cette offensive, marquée par un coût humain désastreux, illustre les difficultés des armées de l’époque à briser les lignes de tranchées. En Artois, l’échec de cette opération laisse une impression durable sur la population et sur la stratégie militaire des Alliés. Arras, comme d’autres villes du front de l’Ouest, voit ses infrastructures mobilisées, ses habitants déplacés, et ses ressources drainées pour soutenir un conflit qui s’éternise.
La bataille de Loos reste ainsi gravée dans l’histoire comme un exemple des sacrifices et des erreurs de la Première Guerre mondiale. Dans les mémoires, Arras et ses alentours sont associés à cette période de souffrance, marquée par l’impact des offensives répétées et des stratégies souvent inadéquates pour percer le front. Ce champ de bataille, à quelques kilomètres de la ville, rappelle aujourd’hui encore les combats acharnés qui ont façonné la région d’Artois et l’histoire de la Première Guerre mondiale.
D.A.